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Les Voisins en studio

Les fans les plus fervents de la chorale peuvent
la retrouver sur plusieurs albums.

Jean-Marie Leau n’en fait pas mystère, son rêve quand il a débuté dans le métier, était de «faire partie de ceux qui vendent des albums. C’était le critère le plus franc et le plus absolu du succès. À l’époque, le disque était encore une valeur centrale». Les Voisins et lui en enregistreront cinq. En 1995, à peine plus d’un an après la création de la chorale, c’est Une musique (éditions musicales de TF1), qui produit un album sobrement titré Les Voisins du dessus; en 1998 l’Association pour la promotion du patrimoine vocal et musical (1) reçoit le soutien de la Fondation France Télécom pour Vu à la maison ; en 2001, Naïve prend le relais pour Variété de chanteurs ; trois ans plus tard, On n’est pas là par hasard est financé intégralement par l’APVM. Enfin, en 2010, sort un disque pour enfants, À tout bout de chants, sous le label Victorie. Les choristes considèrent chaque projet comme un cadeau supplémentaire. Une nouvelle aventure qu’ils n’auraient jamais eu l’occasion de vivre sans la chorale et qui leur réserve bien des surprises. Notamment le fait que pour arriver à 45 minutes d’enregistrement on peut passer vingt fois plus de temps en studio. «C’est une très chouette expérience. Très chouette mais aussi longue et laborieuse, précise Sylvie Lahuppe qui a enregistré trois des albums. En studio, la précision est indispensable, tu ne peux pas te permettre de faire n’importe quoi. Impossible de “te cacher derrière la grosse voix” comme en concert (allusion à une chanson du répertoire) Arrivée à la chorale plus tardivement, Laurence Biron n’a participé qu’au disque pour enfants. «C’est un domaine que je ne connais pas du tout, j’ai trouvé très intéressant de voir comment ça se passait et ça a été une chance d’y participer, reconnaît-elle. Le projet était fédérateur et on finissait par être très attachés aux chansons, ce qui n’était pas évident au départ, s’agissant d’un répertoire jeunesse. C’est un exercice difficile, car tout le monde chante toutes les voix, sauf quand on n’est vraiment pas dans la tessiture, pour qu’il y ait un effet de groupe: on était dix et on a l’impression qu’on est très nombreux. Mais il peut y avoir des écarts infimes entre chacun et il faut un bon ingénieur du son derrière. Quant aux solos, c’est hyper-impressionnant, car tu as ton casque, tu es face à ton micro et tout repose sur toi.» Le bon ingénieur du son en question s’appelle Raphaël Tidas, c’est l’associé de Jean-Marie Leau depuis 1993. Fidèle aux Voisins depuis leur création, il ne cache pas la difficulté de l’exercice. «Des imperfections qui passent en concert parce qu’on ne réécoute pas dix fois derrière, sur un disque ça peut parfois être sans pitié. C’est pareil pour les pros, on peut passer des heures à essayer d’enregistrer une chanteuse très connue et encore plus de temps derrière à bidouiller avec des ordinateurs pour que ça ressemble à quelque chose. Mais là, le nombre ajoute à la difficulté. Il faut gérer les nuances et la justesse pour tous au même moment. Or, c’est rébarbatif de travailler en studio. Entre les répétitions pour être parfaitement au point et le fait qu’on enregistre ensemble puis voix par voix, on peut passer plusieurs heures sur un seul titre. Il y a toujours une envie de bien faire mais la concentration s’effiloche image non disponible inévitablement, c’est le cas pour tous les enregistrements. Sauf que là, il faut avoir l’attention de tout le monde en même temps, comme dans une classe!» Et les choristes sont parfois plus dissipés que des collégiens. Ça ne pardonne pas quand on n’est jamais bien loin d’un micro et que la moindre remarque, captée par le circuit des casques, est retransmise en direct à toute l’assistance ! Finalement, les différents enregistrements seront plus bénéfiques pour la cohésion du groupe que pour les finances de l’association. Et il est fort probable que davantage d’auditeurs écoutent les Voisins sans le savoir (ils ont assuré

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Soutenir une démarche

En 2001, la maison de disques Naïve, «éclectique et non conformiste» comme elle se présente, produit un disque des Voisins du dessus. Son directeur général de l’époque, Frédéric Rebet, explique le sens de sa démarche. «Une amie commune m’avait présenté à Jean-Marie, que j’ai immédiatement apprécié pour toutes ses qualités et notamment son énergie et cette envie de partager qui est éminemment salvatrice. Le croisement de nos deux enthousiasmes s’est concrétisé dans la sortie d’un album. C’était compliqué de faire exister quelque chose qui dégage une espèce de magie sur scène, d’arriver à le transformer en projet discographique où il n’y a aucun échange, rien de vivant. Quand j’ai vu les Voisins en spectacle, ce qui prévalait par rapport à la qualité de la performance, c’était la qualité de l’intention et l’effet rendu. Difficile à traduire sur un support discographique : cette étincelle que l’on voit dans les yeux des gens, qui se retranscrit dans la voix, c’est l’apanage du spectacle vivant. Mais, de temps en temps, il faut aller au-delà de tout ça et malgré ce handicap, j’ai considéré que sortir un disque était une forme de témoignage, une façon d’accompagner une idée, une démarche, une personne. Naïve était un peu à part, on se voulait très ouverts, on disait qu’on était une maison d’artistes, pas une maison de disques. Je n’avais aucune idée du succès potentiel, mais ce n’était pas le sujet. Je ne me suis pas dit : «Oh là là, c’est compliqué, on risque de ne pas en vendre !» Je me doutais bien que ce serait compliqué de transformer une réussite humaine et scénique en un projet discographique vendu en magasin. Avoir une écoute qui s’arrête à la performance vocale était hors de propos. Dans les labels discographiques aujourd’hui, on est très attaché au succès et au côté probant d’un album, il faut qu’il y ait des titres qui puissent passer en radio, etc. Moi, ce qui m’intéresse, c’est de suivre des artistes dans leur expression, et l’expression de Jean-Marie à l’époque était d’arriver à faire chanter des gens dont ce n’était pas le métier et de les faire monter sur scène et enregistrer. Pour moi c’était évident de l’accompagner.»

les choeurs sur plusieurs disques, dont la comédie musicale Notre Dame de Paris ou un album des Enfoirés) qu’en connaissance de cause. Si le succès commercial est modeste, c’est non seulement parce que la convivialité des spectacles voisinesques est intraduisible sur CD, mais aussi parce qu’on ne peut vendre de disques qu’en se démenant tous azimuts pour faire de la pub. Un investissement en temps et en argent difficile à assumer pour une modeste association.
(1) L’APVM est l’association loi 1901 qui gère les activités de la chorale.

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