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Vu et
approuvé

Professionnels de la musique
ou du spectacle, ils connaissent
les Voisins du dessus depuis
longtemps. Et ne tarissent
pas d’éloges.

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ZAZIE

C’était au début des années 2000. Jean-Marie Leau et Vincent Baguian m’avaient parlé des Voisins du dessus. L’idée me plaisait et lorsqu’ils m’ont proposé de participer à un concert qu’ils donnaient en commun, au profit de l’association Dessine-moi un mouton, à La Cigale, j’ai dit : «Pourquoi pas?» J’étais invitée surprise et on a fait un atelier sur ma chanson Je, tu, ils. Je suis aussi allée voir un concert en tant que simple spectatrice. J’ai trouvé ça réjouissant, voire jouissif. Ce qui m’a marquée avant tout, c’est de voir les acteurs-spectateurs qui se délectaient, rigolaient, c’était totalement indiscipliné, les gens chantaient, se déplaçaient, il y avait des feuilles qui passaient avec des textes, c’était une joyeuse pagaille, mais c’était rafraîchissant de voir un spectacle fait aussi bien par les gens sur scène que par les gens dans la salle. C’était une bonne idée, une vraie idée originale. Il y avait une interaction réelle et on sentait que les spectateurs étaient investis d’une espèce de mission, se disant «ça va être réussi si, nous, on s’y met aussi un peu». C’est toujours très interpellant quand on voit des choses nouvelles. La qualité du spectacle m’a bluffée parce qu’on est avec des gens qui sont aussi pompier, charcutier et comptable, mais ils partagent un plaisir commun et une envie de faire les choses bien. Ce n’est pas juste de la rigolade, il y a de la musique là-dedans! La musique amateur vaut autant que celle qui permet de gagner de l’argent. Le fait que les Voisins soient des amateurs et proposent un spectacle de cette qualité-là désinhibe les spectateurs.

Il y a une espèce de capillarité, sur le mode: «Ils ont l’air de bien de se marrer, pourquoi pas nous?» Cette proposition de faire chanter le public relève aussi d’une position sociale. C’est rendre la musique à ceux à qui elle est destinée. Nous, on passe par l’étape très désincarnée du disque, on ne voit pas la tête des gens, on ne sait pas comment ils reçoivent nos chansons. Là, on enlève les intermédiaires, on enlève le côté entreprise et business de la musique, ça la remet dans un contexte plus socialement sain. C’est bien aussi que les Voisins aient un répertoire original: ça participe à la création et ça montre qu’il n’y a pas besoin qu’un titre passe douze mille fois à la radio pour que le public puisse le chanter. Ça prouve qu’on peut faire un spectacle intéressant sans avoir eu besoin d’accrocher les gens avant. On les accroche sur d’autres choses: sur la curiosité, l’envie de découvrir. Et aussi sur le plaisir de chanter, qui est un plaisir physique, pur, simple, abordable. Quand on chante ensemble, on partage quelque chose, on ne se tape pas sur la figure, c’est très unifiant, ça fait du bien par les temps qui courent. CLARIKA J’ai connu les Voisins du dessus par l’intermédiaire de Vincent Baguian. Je les ai vus plusieurs fois en concert: quand mes filles étaient petites, j’aimais beaucoup les amener. J’ai été leur invitée, mais ils ont aussi fait des choeurs pour moi. Je ne suis pas du tout familière du monde des

chorales, mais ça m’apparaissait assez moderne, très festif, j’aimais vraiment bien. On sentait une belle alchimie, ça projetait quelque chose de convivial, drôle, fantaisiste. Je trouvais aussi très intéressant que ce soit des chansons originales. La forme était sympa mais en plus le fond, c’est-à-dire l’interaction avec le public, était inédit. Cela dit, je vais contredire Jean-Marie sur le fait que les professionnels sont déconnectés des amateurs, car ça n’est pas mon cas. Sur un album, j’ai fait intervenir, pour un titre qui s’appelle Rien de tel qu’une petite chanson, des gens qui étaient non seulement pas des professionnels, mais même pas des choristes. On l’a enregistré pendant un repas de famille, on avait installé un petit studio mobile à côté de ce grand banquet et les gens venaient chanter, certains carrément faux, mais ça colle bien avec la chanson. Pour mes faux adieux au Palace déjà, j’avais chanté avec une chorale, j’avais adoré. Cela dit, ce sont des amateurs, mais ils font le job, je n’ai pas eu une impression d’amateurisme. Récemment, mon projet a été retenu pour une résidence d’artistes dans les Vosges pendant dix-huit mois. Nous avons proposé de jouer avec des amateurs. Les musiciens avec qui je travaille ont écrit des arrangements sur mes chansons, des chefs de choeurs sur place ont fait répéter, nous nous sommes rencontrés régulièrement tous ensemble avec les 170 musiciens et choristes qui participaient. Pour finir, on a donné deux concerts exceptionnels dans un village vosgien, Corcieux. J’ai beaucoup apprécié le contact avec ces gens, d’autant qu’il y avait de tout, des ados de 14 ans, des petites mamies… Chanter avec tout ce monde, ça apporte une dimension supplémentaire, un souffle particulier. JACKY NERCESSIAN J’ ai côtoyé les Voisins du dessus au début des années 2000, car je suis ami avec Jean-Marie Leau. Dire que j’ai mis en scène certains de leurs spectacles est un bien grand mot, mais j’ai apporté quelques idées, un peu de cocasserie. J’ai imaginé une maison dans laquelle je jouais le rôle de concierge, un élément fédérateur, un personnage un peu loufoque qui arrivait régulièrement sur scène et racontait des choses drôles. J’ai participé à de nombreux concerts, aussi bien à la Gaîté Montparnasse qu’au Sentier des Halles ou à l’Européen. Nous sommes même partis à Barcelone ensemble, j’avais demandé une traductrice que j’avais incluse dans le sketch. Il y avait une grande part d’improvisation dans mes interventions, je m’adaptais au public, plus ou moins chaleureux selon les soirs. Certaines chansons me faisaient rire, beaucoup sont joyeuses, et Jean-Marie est un très bon mélodiste en plus d’être un excellent meneur de troupe et de public. Mais c’est surtout l’ambiance qui me plaisait. Les Voisins sont portés par le désir de chanter ensemble, le public se reconnaissait en eux. Certains spectateurs, très minoritaires, n’aimaient pas du tout, les autres comprenaient bien que le seul but c’était de partager le plaisir de chanter. Voir des amateurs sur scène ça donne envie d’y monter aussi. Le sens de la démarche, c’était de montrer à ces gens qu’ils savaient chanter, de les décomplexer. D’ailleurs, Chaplin disait: «Nous sommes tous des amateurs, nous ne vivons pas assez longtemps pour être autre chose.» Tout à coup, les gens n’avaient plus peur du jugement des autres, ils prenaient du plaisir sans s’autocensurer. C’était une époque d’une grande liberté, on pouvait proposer des choses folles, débridées et les spectacles des Voisins laissaient place aux rencontres, à l’imprévu. Ils ouvraient le champ des possibles. ROBERT GOLDMAN L a première fois que j’ai vu les Voisins du dessus en spectacle, vers 2006 ou 2007, ça a été un triple choc. Un choc dû d’abord aux gens qui composaient la chorale, à leur éclectisme; ensuite à la qualité technique de leur prestation; enfin à la manière dont ils savaient utiliser le plaisir et le désir de chanter du public, car ils nous avaient appris des chansons qui n’étaient pas simples et les spectateurs avaient joué le jeu avec enthousiasme. J’avais dit à Jean-Marie que je trouvais le répertoire presque trop ambitieux, car le travail d’harmonie, le rythme rendent ces chansons difficiles à chanter. Mais c’est lui qui avait raison. Les Voisins sont des amateurs, mais ils donnent tout, ce n’est pas incompatible, bien au contraire. Plein de gens jouent au tennis en y mettant tout leur coeur même s’ils savent qu’ils ne feront jamais Roland-Garros. Je voyais tellement, dans nos métiers, de gens qui avaient plus le désir de célébrité que le désir de chanter, que j’avais été impressionné par le simple désir fort

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de chanter ensemble. Chanter en choeur c’est le plaisir d’unir nos ego et que nos ego ne prennent pas le pas. Je plains ceux qui n’ont pas ça. Quand on a eu besoin, pour la soirée des Enfoirés, d’une chorale qui savait bouger sur scène, on a pensé aux Voisins. C’est quelque chose de difficile, les répétitions pour le chant se font très en amont, mais on répète la mise en scène dans l’urgence et les derniers réglages se font sur scène. C’est pour ça qu’on a sept concerts avant la captation et que le premier est un peu moins cher, vendu comme répétition générale, car on n’est jamais à l’abri d’une petite erreur. Les Voisins ne nous ont pas déçus: le côté amateur est dans l’approche mais pas dans le résultat. La physionomie de cette chorale dépend en partie de Jean-Marie: si demain, il arrêtait et qu’un autre leader se dégageait, ce groupe serait complètement différent. C’est quelqu’un qui allie une force de travail très impressionnante et des connaissances techniques et musicales remarquables, mais surtout qui a plaisir à partager et à faire découvrir. À part ça, il est très drôle. Et il fait preuve d’une autorité bienveillante. Il a trouvé un bon équilibre entre ces deux mots. RICHARD CROSS Je connais Jean-Marie Leau depuis très longtemps, avant qu’il ne fonde les Voisins du dessus. Quand il m’a fait part de son projet, j’ai été très enthousiaste, car je soutiens depuis longtemps l’idée que si la France a beaucoup de retard sur le plan musical, c’est parce qu’on n’a pas cette expérience du chant choral qu’on a dans les pays anglophones, à l’école, à l’université et dans la famille. On n’a pas du tout ce même rapport à la voix des ensembles car, en France, les identités régionales ont été fondues autoritairement dans l’identité nationale, ça a eu l’effet délétère de faire disparaître la culture vocale française. Il n’y a pas de chansons que tout le monde chante, et ça, c’est vraiment spécifique à ce pays. Or, on ne peut pas identifier sa voix sans ces deux choses fondamentales que sont le groupe et sa langue natale. Chanter ensemble a une fonction hautement significative et très importante pour la construction du rapport à la voix, beaucoup plus que chanter tout seul dans son coin. On partage des tas d’événements sur le plan rythmique, harmonique et puis ça protège: quand on chante dans un groupe, on a inconsciemment une sorte de lâcher prise, ce qui est plus difficile quand on se retrouve tout seul en train de chanter devant des gens. Le groupe a un effet extrêmement porteur et efficace. Ce que j’ai trouvé intéressant dans la démarche de Jean-Marie, c’était l’ouverture musicale. Et puis, le nom, la façon de se présenter, son projet était moderne. Il faut sortir aujourd’hui de toutes les formes de limitations pour maintenir ce tissu social chanté qui malheureusement n’existe plus dans les familles. Je fais partie d’une génération qui a essayé de se réapproprier la voix, j’ai oeuvré pour que la France devienne un peu plus chantante. Et c’est aussi ce que fait Jean-Marie. C’est quelqu’un que j’ai toujours apprécié aussi bien pour ses qualités artistiques qu’humaines, car, dans ce milieu, les gens peuvent parfois ne pas être très sympathiques, être prétentieux. Ce que j’aime chez Jean-Marie, c’est qu’il a à la fois la compétence, le professionnalisme et la simplicité. C’est quelqu’un dont je trouve les actions formidables et je le soutiens depuis toujours. FRANÇOIS BERNHEIM J’ai connu Jean-Marie au tout début de sa carrière, quand il cherchait à écrire des chansons pour les interprètes. Max Amphoux, un grand éditeur, me l’avait présenté en disant : «Celui-là a du talent.» C’était un jeune homme très humble, bon pianiste, bon guitariste, qui faisait des petites maquettes, un mec qui démarrait de façon tout à fait classique dans ce métier, qui cherchait à rencontrer des gens, à s’inscrire dans un ou deux projets. Cela dit, au début, ça s’est mal passé entre lui et moi, on s’est frités, je ne me souviens même plus pourquoi, mais c’est comme ça que commencent les vraies amitiés.

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Au bout d’un moment, on s’est réconciliés, il m’a dit: «Je monte une chorale, tu veux venir aux répétitions?» Bien sûr, j’y suis allé. J’étais même très accro! Je me mêlais au truc, j’adorais ça. J’ai été soliste des Petits Chanteurs à la croix de bois quand j’avais onze ou douze ans. Tout ce qui est chorale, polyphonie, ça m’intéresse beaucoup, parce que c’est le lieu d’intégration par excellence pour des gens que la passion du chant réunit . Je fais un parallèle avec les Poppys. On avait eu cette idée, une amie et moi, de faire chanter à des gosses des textes d’actualité. On a fait deux ou trois chorales de mômes et on est tombés sur celle d’Asnières, qui était dirigée par Jean Lamoureux, un pro. Il y avait de tout, le fils d’ingénieur, le fils de prof, le fils d’ouvrier immigré. Ça a été un gros choc dans ma vie: 5 millions de disques en deux ans et la possibilité pour des enfants de chanter enfin des choses qui n’étaient pas bêtifiantes. Il y a beaucoup de points communs avec les Voisins: ce sont des gens de tous horizons, amateurs, qui se retrouvent sur de vraies scènes, pour chanter un répertoire original. Pour les Voisins, comme pour les Poppys, j’ai écrit des chansons. Ce qui me plaît c’est d’arriver avec un morceau, avoir une trentaine de paires d’yeux braqués: qu’est-ce qu’il va nous pondre? Tu vois tout de suite si c’est bien ou pas. J’aime beaucoup aussi être l’invité lors des concerts des Voisins. Le fait de revenir sur scène et, quand la chorale chante avec moi, de sentir cette espèce de masse derrière, j’adore ça. En plus, l’ambiance est particulière grâce à cette idée de faire chanter le public qui n’est pas dans la culture française. Dans n’importe quelle taverne, en Irlande ou ailleurs, ça chante ensemble. En France, c’est compliqué, il y a une espèce de pudeur qu’il faut vaincre, les artistes qui essaient de faire chanter les gens en concert le savent bien. Les gens commencent à regarder leur voisin: oui, elle y va, il y va, donc j’y vais. Ailleurs, on n’attend pas de voir si l’autre chante. C’est une vraie bonne idée, cette interaction avec le public. VICTOR JACOB Mes parents se sont tous les deux inscrits comme choristes aux Voisins du dessus quand j’avais 4 ou 5 ans. Rapidement, je suis allé assister aux répétitions et aux concerts parce que j’ai toujours aimé la musique.

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C’est là que j’ai découvert toutes les étapes qui permettent de mettre sur pied une représentation. J’aimais bien le répertoire, même si, au début, je chantonnais parfois en phonétique sans bien comprendre les paroles. Et puis j’appréciais la bonne ambiance qui régnait et la liberté qu’on me laissait de rester dans mon coin à jouer ou bien de chanter avec le choeur. Parmi les concerts qui m’ont marqué, il y a bien sûr ceux où les Voisins ont côtoyé des gens connus comme cette sorte de festival à l’Hôtel de ville avec Jacques Higelin ou bien le spectacle où Zazie est arrivée par surprise. Mais il y a avant tout la Gaîté, car c’est là que Jean-Marie m’a proposé de chanter sur scène avec la chorale. Je me souviens que j’avais un short et il m’avait dit que je bougeais trop, ce qui faisait bouger le short et n’était pas esthétique. Voilà ce qui m’a marqué ! Je n’avais pas le trac, je n’avais pas peur d’avoir un trou, comme ça peut être le cas aujourd’hui. Ça me paraissait complètement naturel d’être là, car je connaissais toutes les chansons par coeur, je les chantais aux répétitions, j’étais déjà monté sur la scène de la Gaîté avec le public.

Mais c’est là que ma marraine, m’a entendu chanter au milieu du choeur. Elle est enseignante, travaille beaucoup avec la musique et elle a dit à mes parents que la façon dont je chantais était exceptionnelle pour mon âge. C’est ce qui les a incités à m’inscrire à la Maîtrise de Radio France où je suis resté neuf ans. Après le bac, parallèlement à mes études de musique, j’ai commencé à chanter professionnellement dans des choeurs avant de m’orienter vers la direction d’orchestre. Aujourd’hui, mon projet c’est de monter un choeur et un orchestre en parallèle parce qu’il y a une espèce de clivage entre les deux. Le choeur est un peu isolé de la vie de l’orchestre, je voudrais le réhabiliter. Toutes ces soirées vécues avec les Voisins m’ont appris le travail de répétition, la polyphonie – déjà à l’époque je pouvais chanter une voix facilement alors que d’autres chantaient des mélodies différentes à côté – le rôle du chef de choeur, les méthodes pour travailler ensemble. Je le dis très clairement, si je suis musicien aujourd’hui, c’est en grande partie grâce aux Voisins.

VIES D’ARTISTES

• Cinq Victoires de la musique, six disques de platine, est-il encore utile de présenter Zazie ?
• Clarika est la jumelle des Voisins du dessus puisque son premier disque est sorti fin 1993. Si elle a enregistré six albums appréciés d’un public de fidèles, le grand public la connaît surtout pour son tube “Les garçons dans les vestiaires”, reflet de son écriture ciselée et de sa douce ironie.
• Robert Goldman est auteur-compositeur, il a écrit pour une large palette d’interprètes au nombre desquels Yannick Noah, Michel Sardou ou encore Céline Dion. Il est également producteur, cofondateur de la maison de production JRG avec son frère Jean-Jacques.
• Jacky Nercessian exerce ses talents de comédien au cinéma et au théâtre après avoir été animateur de télévision (notamment du Narcisso show) à l’époque où le non-conformisme était autorisé sur le petit écran.
• «Chanteur classique de formation, chanteur moderne d’adoption», Richard Cross a élaboré le concept de coaching vocal dans les années 80. Depuis, de très nombreux artistes ont fait appel à lui pour travailler leur voix.
• François Bernheim est chanteur, compositeur et producteur de musique. Il a écrit pour divers artistes, notamment pour Patricia Kaas dont plusieurs tubes (Mon mec à moi, D’Allemagne, Entrer dans la lumière, etc.) sont signés de sa plume.
• Le nom de Victor Jacob ne vous dit rien mais ça ne saurait tarder. Jeune musicien ultra-doué, il suit la classe de direction d’orchestre de la Royal Academy de Londres. Il a coécrit avec Jean-Marie Leau le spectacle Pop the Opera, composé de morceaux de musique pop arrangés pour un choeur classique.